Kinshasa face à ses urgences : l’heure de vérité pour le gouverneur Daniel Bumba Lubaki

Kinshasa traverse l’une des périodes les plus critiques de ces dernières années. Entre insécurité, insalubrité persistante, routes dégradées et catastrophes à répétition, la capitale semble prise dans un cycle de vulnérabilité chronique. Pourtant, jamais les annonces officielles n’ont été aussi nombreuses : kilomètres de routes inaugurées, opérations d’assainissement, réformes administratives, promesses d’un « nouveau visage » pour la ville. Mais à l’épreuve des faits, une question s’impose : où sont les résultats concrets pour les Kinois ?

Inondations : quand la négligence tue

Les pluies du mois d’avril 2025 ont exposé la fragilité structurelle de Kinshasa. En une seule nuit, des quartiers entiers ont été submergés, des voies coupées, des familles sinistrées. Le gouverneur Daniel Bumba a communiqué un bilan provisoire d’au moins 22 morts, tandis que d’autres sources parlent d’une trentaine de victimes.

Ces drames ne relèvent pas uniquement de la fatalité naturelle. Ils reflètent les failles profondes d’une ville où les caniveaux obstrués, l’absence de drainage efficace et la construction anarchique sont devenus la norme. Le manque d’anticipation, de prévention et d’entretien révèle une gestion incapable de protéger ses habitants contre des épisodes pourtant prévisibles.

Voirie : des chiffres annoncés, une réalité inchangée

Au cours de ses communications officielles, Daniel Bumba revendique plus de 100 kilomètres de routes réhabilitées en un peu plus d’un an. Une performance qui, sur le papier, témoigne d’un volontarisme certain.

Mais la réalité quotidienne des Kinois raconte une autre histoire :

85 % des voiries revêtues seraient dans un état de délabrement avancé ;

De larges portions des routes secondaires demeurent impraticables ;

Les inondations détruisent fréquemment les quelques réfections réalisées.

Ce décalage entre les chiffres et le vécu illustre un problème majeur : la priorité semble être donnée à des chantiers visibles et médiatisés, sans stratégie de durabilité ni entretien continu — pourtant indispensables dans une ville de plus de 15 millions d’habitants.

Insalubrité : le chantier sans fin

Kinshasa souffre également d’une crise d’insalubrité devenue chronique. Malgré les opérations d’assainissement annoncées et les injonctions données aux bourgmestres, l’accumulation des déchets dans les rues, les marchés et les cours d’eau persiste. Le manque de gestion des déchets, l’insuffisance des infrastructures et l’absence de suivi rigoureux rendent toute solution durablement effective impossible.

Ici encore, la ville semble naviguer à vue, enchaînant des mesures ponctuelles là où un plan global est indispensable.

Gouvernance : entre communication et responsabilité

Le gouverneur Bumba communique, multiplie les réformes internes, réaménage son cabinet et promet un « nouveau souffle ». Pourtant, la gouvernance reste marquée par un manque de transparence, l’absence d’indicateurs publics précis et une faible redevabilité.

Quel est le budget exact alloué aux travaux d’assainissement ?

Quels sont les contrats passés avec les entreprises de voirie ?

Quelles sont les priorités réelles de la ville-province ?

Ces questions restent sans réponse pour les citoyens, qui constatent davantage de conférences de presse que de progrès visibles.

Un appel à la responsabilité

Kinshasa mérite une gestion à la hauteur de ses défis. La sécurité, l’assainissement, l’urbanisme et la mobilité urbaine ne peuvent plus être abordés sous l’angle des interventions ponctuelles. Il faut une vision stratégique, un suivi permanent, une transparence totale et surtout une volonté politique capable de dépasser les effets d’annonce.

Aujourd’hui, le gouverneur Daniel Bumba Lubaki se trouve à un tournant de son mandat. Ses décisions, ses priorités et sa capacité à produire des résultats concrets détermineront non seulement son héritage politique, mais aussi la dignité quotidienne de millions de Kinois.

La capitale n’a plus besoin de discours : elle a besoin d’actions, de courage, et d’une gestion rigoureuse. L’heure de vérité a sonné.

Par Salem Mapuna Analyste psycho-politique