Procès Kabila : quand la justice flirte avec la démesure Tribune de Salem Mapuna – Le Politico-Psychologue

Le 21 août 2025, les avocats des parties civiles ont réclamé 24 milliards de dollars américains contre Joseph Kabila. Une somme astronomique, accompagnée de demandes encore plus spectaculaires : la déchéance de nationalité, la confiscation des biens, et la requalification des charges en espionnage.
Mais une question dérange : sommes-nous encore dans un procès de justice ou déjà dans une scène de théâtre politique ?
Psychologiquement, ces réclamations gigantesques fonctionnent comme une compensation imaginaire. Le peuple congolais, frustré par des décennies de guerre, de pauvreté et de corruption, voit ses blessures traduites en chiffres colossaux. Cela donne l’illusion d’une réparation, mais c’est une réparation symbolique, presque irréalisable dans les faits. Car tout le monde le sait : ces milliards ne rentreront jamais dans les caisses de l’État.
Politiquement, l’affaire dévoile une dérive inquiétante. En cherchant à frapper fort par des montants impossibles, la justice risque de perdre sa crédibilité. La quête de vérité et de responsabilité pourrait être noyée dans le sensationnalisme. Le danger, c’est que le procès apparaisse moins comme une recherche de justice que comme une instrumentalisation mémorielle, où l’on juge un homme absent pour solder une Histoire trop lourde.
Ce qui devait être une étape vers la réconciliation nationale risque alors de devenir une fracture supplémentaire. Au lieu de rapprocher le Congo de la vérité et de la justice, on risque de l’enfoncer dans une logique de spectacle judiciaire, où l’excès efface la rigueur.
Pour terminer, l’audience du 21 août laisse une impression paradoxale : la justice a parlé, mais son message semble brouillé. La vraie question demeure : veut-on vraiment rendre justice, ou simplement écrire une nouvelle légende politique autour de l’ancien président ?
Salem Mapuna – Le Politico-Psychologue