Accès aux financements : pourquoi les jeunes congolais restent-ils les grands oubliés ? [Jerome NTUMBA]

3 Oct 2025 - 14:49
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Accès aux financements : pourquoi les jeunes congolais restent-ils les grands oubliés ? [Jerome NTUMBA]

On aime répéter que la jeunesse congolaise est « l’avenir du pays ». Mais il suffit de regarder la réalité pour voir le paradoxe : cet avenir-là est privé des moyens d’exister. Derrière les discours officiels, les jeunes restent les grands oubliés de l’accès aux financements. Jérôme NTUMBA

Prenons un exemple concret : de Kinshasa, beaucoup de jeunes ont des idées d’entreprise simples mais utiles. Le vendeur de pain qui rêve d’acheter une petite machine pour améliorer sa production, l’étudiante qui voudrait lancer un atelier de couture pour payer ses frais académiques, ou encore le passionné d’agriculture qui imagine une ferme moderne dans son village. Ces projets n’ont rien de farfelu : ils répondent à des besoins locaux, ils pourraient créer des emplois. Pourtant, la plupart meurent dans les carnets de notes, faute d’un premier soutien financier.

Les banques exigent des garanties que peu de jeunes possèdent. Comment demander à un diplômé de 25 ans, sans emploi stable, de présenter un terrain titré ou une hypothèque ? Les programmes publics, eux, sont souvent inaccessibles : procédures interminables, favoritisme, parfois corruption. Quant aux financements internationaux, ils arrivent rarement jusqu’aux petites initiatives locales. Résultat : seuls quelques privilégiés parviennent à franchir le mur.

Le paradoxe est cruel : les jeunes sont encouragés à « entreprendre » parce qu’il n’y a pas assez d’emplois salariés, mais on leur refuse les conditions minimales pour démarrer. Dans un pays où plus de 60 % de la population a moins de 25 ans, cette contradiction est lourde de conséquences. Elle nourrit le découragement, parfois même l’exode, alors que l’énergie de ces jeunes pourrait être le moteur d’un développement endogène.

L’exemple le plus frappant reste celui que j’ai vu dans une agence bancaire de Kinshasa : un jeune homme, visiblement préparé, tentait de présenter son projet à un agent. La réponse a été sèche : « Vous n’avez pas d’antécédents bancaires. » Mais comment en avoir si on ne vous donne jamais votre chance ? C’est le cercle vicieux de l’exclusion.

Le problème n’est pas seulement financier, il est aussi symbolique : tant que les jeunes ne seront pas considérés comme des acteurs à part entière de l’économie, et pas seulement comme des « bénéficiaires » à encadrer, le pays passera à côté d’un potentiel immense.

Il est temps que les mécanismes de financement s’adaptent : microcrédits vraiment accessibles, fonds dédiés aux jeunes, procédures allégées et transparentes. Car ce qu’il manque souvent, ce n’est pas la volonté ni les idées, mais ce premier coup de pouce qui transforme un rêve en réalité.

Et si, plutôt que de répéter que la jeunesse est « l’avenir », on commençait enfin par lui donner un présent ?

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