250.000 jeunes pour la révolution numérique ou 250.000 slogans ? quand l’ambition se heurte à la réalité congolaise

L’État congolais annonce avec fierté un partenariat avec Cisco et Cybastion pour former 250.000 jeunes aux métiers du numérique. Un chiffre impressionnant, calibré pour séduire l’opinion, mais qui interroge profondément la mémoire collective d’un peuple habitué aux promesses sans lendemain.
Psychologiquement, l’annonce rassure la jeunesse en quête de repères. Elle donne l’illusion que l’avenir se construit enfin ici, que les opportunités ne sont plus réservées aux autres. Mais derrière cet effet placebo se cache une question simple : où sont les infrastructures capables de soutenir un tel projet ? Comment parler de cybersécurité dans des provinces où l’électricité reste un luxe et où l’internet est plus capricieux qu’une pluie en saison sèche ?
Politiquement, ce type d’annonce fonctionne comme une anesthésie sociale. En brandissant 250.000 jeunes comme futurs acteurs de la révolution numérique, le pouvoir neutralise temporairement la frustration des laissés-pour-compte. Pourtant, la fracture numérique est telle que ce programme risque d’accentuer les inégalités : ceux de Kinshasa, déjà mieux équipés, auront accès à ces formations, pendant que le jeune de Mbandaka, de Lodja ou de Kikwit ne verra jamais un laboratoire informatique digne de ce nom.
Le danger est là : faire croire à une égalité d’opportunité alors que la sélection sera discrète, inégale et peut-être même politisée. On promet un avenir numérique, mais sans garantie d’insertion. On parle d’entrepreneuriat, mais sans répondre à l’absence de financement réel pour les startups locales.
Pour finir, il est urgent que le ministère publie le coût réel de ce partenariat, la source de son financement et les mécanismes d’évaluation. Sinon, « révolution numérique » risque de devenir un nouveau nom pour « mirage politique ».
Salem MAPUNA, Analyste psycho-politico