Discours de Félix Tshisekedi à Bruxelles : entre volonté de paix et calcul diplomatique ( Prince KINANA )

9 Oct 2025 - 23:00
9 Oct 2025 - 23:02
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Discours de Félix Tshisekedi à Bruxelles : entre volonté de paix et calcul diplomatique ( Prince KINANA )

Lors de son intervention au Global Gateway Forum à Bruxelles, le président congolais Félix-Antoine Tshisekedi a tendu une main à son homologue rwandais Paul Kagame. Ce geste, loin d’être anodin, peut être interprété à plusieurs niveaux — entre stratégie diplomatique, posture d’homme d’État et risque de perception négative.

Une démarche de désescalade ou un aveu d’impuissance ?

En premier lieu, cette ouverture au dialogue pourrait apparaître comme une tentative de désescalade dans un conflit où l’option militaire semble avoir atteint ses limites. Confrontée à une guerre asymétrique à l’Est et à un soutien présumé du Rwanda au M23, la RDC semble vouloir éviter un enlisement prolongé, coûteux sur les plans humain, politique et économique.

Une manœuvre diplomatique pour renforcer la posture congolaise

Au-delà du contexte sécuritaire, la main tendue de Tshisekedi peut aussi s’analyser comme une stratégie destinée à asseoir la crédibilité de Kinshasa sur la scène internationale. En affichant une volonté de paix constante, le président congolais renforce l’image d’un État responsable, respectueux des mécanismes régionaux et internationaux (résolution 2773 du Conseil de sécurité de l’ONU, instruments juridiques africains, etc.). Cette posture sert de contrepoids narratif face aux accusations rwandaises et permet de déplacer le blâme en cas d’échec du dialogue.

Mettre Kigali devant ses responsabilités

Tshisekedi place ainsi le président Kagame dans une position délicate : soit le Rwanda accepte l’ouverture au dialogue et entre dans un processus régional de désescalade, soit il refuse — et s’expose alors à un isolement accru, voire à des pressions diplomatiques supplémentaires. Cette approche peut également servir à réactiver des initiatives africaines (via l’EAC ou l’Union africaine), notamment autour du désarmement ou du retour des réfugiés.

Un geste perçu diversement : entre pacifisme et faiblesse

Toutefois, cette main tendue ne fait pas l’unanimité. Si elle peut illustrer la stature d’un chef d’État soucieux de prévenir une guerre régionale plus vaste, elle est aussi perçue par certains opposants congolais comme un aveu de faiblesse, voire comme une concession inacceptable face à une agression. L’opposition nationale, souvent prompte à exploiter les moindres signes d’ouverture, y voit une posture jugée trop conciliante, surtout dans un climat de méfiance généralisée vis-à-vis de Kigali.

Une ligne politique constante, mais sous tension

Il convient néanmoins de souligner que Félix Tshisekedi n’a pas changé de cap : sa ligne reste celle d’un règlement pacifique du conflit, conformément aux résolutions et cadres légaux internationaux. Sa position n’a pas varié depuis les premières médiations régionales : la paix comme horizon, mais pas à n’importe quel prix. Ce qui change aujourd’hui, c’est l’espace politique dans lequel cette paix est recherchée — entre pressions internationales, attentes nationales et fragilité régionale.

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